jeudi 21 mars 2019

La marche du siècle à Paris, d'Opéra à République

[ par Mat Let, Marielle Durand, invitée et Marion Rivolier ]




Mat Let:
Comme beaucoup de gens, je suis à la fois extrêmement effrayé par les impacts du changement climatique et trop englué dans mes habitudes pour changer radicalement mon mode de vie.
Mais la Marche pour le climat est une excellente occasion de sentir la motivation des autres, de se donner de l'énergie. Et en tant que dessinateur, c'est aussi le bon moment pour agir en faisant ce que l'on sait faire: dessiner.
Nous voilà donc massés sur le parvis de l'Opéra Garnier. L'ambiance est plus proche de la Fête de l'Huma que de la fin du monde, les slogans vont bon train, les bières tournent tandis que je m'emmêle les pinceaux dans la foule et le fronton de l'Opéra.



Arrivé place de la République au soleil couchant, je suis frappé par le calme de ce jeune homme. Perché sur des vélos, il regarde au loin, serein, comme s'il avait compris quelque chose que nous autres, cloués au sol, n'avions pas encore saisi.
Plus terre à terre, je rencontre ensuite JP, des gilets jaunes de Bourges, déguisé en Vercingétorix en hommage aux propos peu flatteurs de notre président sur les "Gaulois réfractaires". Il est investi depuis le début du mouvement et s'est toujours préoccupé de l'aspect écologique, c'est pourquoi il a aujourd'hui rejoint la Marche pour le climat.
Il est dix-huit heures trente passées, le concert est lancé et nous quittons la place de République avec un mélange d'espoir que la belle énergie du jour se transforme en action et de peur que la classe politique reste sourde à notre détresse et à nos demandes...


Marielle Durand:
13h30. La place de l’opéra est comble et le soleil pointe son nez franchement.
Simon et Mathieu sont arrivés et ont déjà démarré leurs carnets. Je tente d’abord une vue générale depuis le trottoir de droite qui fait face à l’opéra. Cela me permet d’avoir une partie du bâtiment et le grand bus aménagé pour l'occasion qui s’est posté devant avec sur sa bannière la citation qui se passe de commentaires : “If we don’t give a fuck, we’re fucked”.
Une femme prend la parole pour scander des phrases aussi justes qu’angoissantes.
“Il ne nous reste plus beaucoup de temps”, “Plus de négociations, c’est maintenant, c’est l’action !!! »… Je suis peu à l’aise devant les personnes qui haranguent les foules tout comme d’être au milieu d’un grand nombre, particulièrement depuis novembre 2015.
Mais le dessin me permet de m’isoler quelque peu de cet état, d’analyser les lieux et la situation et de m’ancrer à un endroit où je me sens à ma place.
Après une brève pause café, on se met en route au milieu du flot de manifestants.


Une batucada, le collectif Zabumba, animera toute notre marche. Bien plus que les sound systèmes, la musique en direct est d’une force communicative inouïe. Je les dessine à reculons et m’amuse de cette performance un peu folle. La joie d’être ensemble est palpable, le temps passe étrangement très lentement, mais l’angoisse liée aux conséquences de nos comportements sur la planète un peu moins.
Vers 17h30, j’arrive péniblement à me frayer un chemin vers les escaliers du boulevard du temple. De ce petit promontoire, la place de la République se laisse embrasser pour un dernier dessin jusqu’à ce que résonnent les premières notes du concert d’Abd al Malik.
Je dois filer et suis un peu sonnée de tous ces mouvements et sonorités dissonantes parfois.
Mais heureuse d’y avoir vu malgré tout un certain nombre s’être déplacés. Seul ou en famille, entre amis, associations, ensembles musicaux, collectifs divers…


Marion Rivolier:
Samedi 16 mars, je ne savais pas combien de temps je pourrais "marcher pour le climat" alors j’ai jeté mon dévolu sur République, le point d’arrivée! J’ai été surprise par la voix d’Abd al Malik qui résonnait dans toute la place, c’était chouette de le voir pour la première fois. J’ai compris que c’était les balances du concert du soir. J’ai sorti mes aquarelles et mes pinceaux pour croquer cette scène habitée par Aziz, Shaka Ponk puis Emilie Loiseau. Les gens dansaient déjà avec quelques pancartes, brochettes, bières ou gilets jaunes.
Je me suis ensuite rapprochée de la statue pour capturer l’ambiance, surtout chaleureuse mais parfois houleuse entre manifestants!
Peu à peu la place s’est remplie, plus de monde, de pancartes, des gens qui se regroupent pour le concert simplement ou d’autres qui pensent qu’on peut changer l’ordre des choses. Consommer moins, partager plus, recycler, réparer, donner et récupérer. Est ce que l’on aime vivre dans ce monde jetable? Ou est-ce-que l’avenir peut être différent ?

1 commentaire:

  1. Merci de nous donner l'occasion de profiter de l'ébullition parisienne. A Auxerre, nous étions au moins mille, mais je n'ai pas sorti mon carnet, il fallait être itinérant...

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